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Peut-on juger l'hérésie ? Réponse à l'abbé Robinne et à Troubadour par John DALY (2005-05-04 12:57:17) Imprimer

L'abbé Robinne affirme que...

« En effet tous les auteurs ayant étudié le problème reconnaissent généralement une chose c'est l'impossibilité de déclarer un pape hérétique. La seule chose possible est de déclarer que telle proposition est hérétique...»

Et Troubadour déclare que « Nul d'entre nous n'est habilité de son propre mouvement à déclarer déchu de sa charge et dépouillé de ses pouvoirs un membre quelconque de la hiérarchie. »

Voilà deux doigts posés sur le problème épistémologique - comment savoir? Je voudrais répondre aux deux en même temps, car ce consensus prétendu d'auteurs qui croit impossible de constater l'hérésie chez le particulier n'existe pas et les autorités en effet s'y opposent (comme je vais le montrer en en citant), pourvu qu'on entende correctement la nature de ce jugement.

Ainsi au propos de Troubadour je réponds - Distinguo. Déclarer cette déchéance à la manière d’une peine ou d’une sentence déclaratoire, concedo. Déclarer cette déchéance comme constat privé d’un fait certain, nego.

N’étant pas juges, nous ne pouvons juger de façon à lier autrui. N’étant pas des bêtes, nous ne pouvons nous abstenir de porter des jugements intellectuels sur des propos controversés. Et de ce point de vue, le jugement que Benoît XVI est le Vicaire sur terre de Notre-Seigneur est autant un jugement que le contraire. L’important est que notre jugement soit conforme à la réalité.

M. l’abbé Belmont a déjà montré plusieurs raisons pourquoi il est impossible que Jean-Paul II ait été réellement pape, puisque un vrai pape ne peut pas faire ce qu’il a fait sur le plan doctrinal, liturgique, juridique.

Il y a eu, donc, déchéance (par quoi je ne veux pas soutenir que Karol Wojtyla ait jamais été réellement pape).

Pour la question secondaire d’en trouver la cause, d’aucuns hésitent à affirmer franchement que Karol Wojtyla était hérétique. On voudrait que ce jugement soit réservé à l’Église. On comprend bien le désir d’éviter le syndrome de « mitrailleuse d’anathèmes » dont certains sédévacantistes ayant plus de fougue que de sérieux sont atteints. Mais il convient de voir si l’attitude de l’Église elle-même s’oppose à ce qu’un particulier fasse un tel constat d’hérésie, anticipant à titre privé son propre jugement.

Pour ma part j’avance que le particulier a bien le droit un certains cas de juger qu’untel soit hérétique avant le jugement directe de l’Église et je vais donner ci-dessous une douzaine de preuves venant de l’autorité qui soutiennent ceci.

Mais je crois qu’il faut pour ceci il faut que quatre conditions soient respectées :


1. La fausse doctrine tenue par la personne en question doit être en opposition manifeste et directe avec une vérité certainement à croire de foi divine et catholique*.

2. Il doit être moralement certain que le coupable se rend compte du conflit direct entre son opinion et l’enseignement de l’Eglise Catholique**

3. Un tel jugement ne peut obliger en conscience que celui qui la forme, en pleine connaissance de cause, et personne d’autre***.

4. Il est obligatoire de pencher charitablement en faveur de la personne soupçonnée de l’hérésie dans la mesure du possible****.

Il faut donc éviter les pièges suivants :
1. Appeler « hérésie » une erreur qui s’oppose à une doctrine enseignée par l’Eglise mais pas comme devant être crue de foi divine et catholique ou qui n’entre pas certainement dans cette catégorie-ci ;

2. Appeler « hérésie » une erreur s’opposant à une doctrine à croire de foi divine et catholique, là où l’opposition n’est pas directe, mais dépend de plusieurs pas de raisonnement : en pareil cas, la qualification « hérésie » ne saurait être à propos avant un jugement définitif de la part de l’Eglise ;

3. Accuser de schisme ou d’hérésie ceux qui, sans admettre l’hérésie en question, refusent de la qualifier d’hérésie ou de considérer comme étant hérétiques ceux qui la tiennent, en attendant un jugement formel de l’Eglise ;

4. Affirmer la présence de la pertinacité là où d’autres explications peuvent raisonnablement se concevoir.

Avant de donner les preuves positives, je réponds à deux objections courantes :

Objection 1. « Le propos hérétique est un propos directement et clairement opposé à une doctrine à croire de foi divine et Catholique, ce que le particulier peut constater. Mais le délit d’hérésie, qui rend le coupable hérétique, exige aussi la culpabilité morale - le rejet conscient de la doctrine catholique de la part de celui qui n’ignore pas le devoir de l’admettre. Cet élément s’appelle la pertinacité. Il n’existe que dans l’âme et ne peut pas donc être l’objet du jugement d’un particulier qui ne voit que l’externe. »

Réponse : Comme pour tout autre péché, le chrétien doit s’évertuer à ne pas attribuer le péché d’hérésie à son prochain tant qu’une autre explication reste possible. Mais la charité n’oblige pas aux acrobaties mentales pour excuser ce qui est manifeste. En outre, il ne s’agit pas, en notre thèse, de constater la pertinacité telle qu’elle est définie par les moralistes, mais telle quelle est définie par les canonistes : rejet conscient du dogme de la part d’un baptisé*****. Cela écarte l’ordre moral, ne jugeant qu’au for externe - sans pourtant tomber dans l’erreur de présumer la pertinacité là où reste la possibilité d’une simple ignorance ou inadvertance. « L’obstination peut être présumée lorsqu’une vérité révélée a été proposée avec assez de clarté et de force pour convaincre un homme raisonnable. » (Dom Charles Augustine : A Commentary on Canon Law, Vol. 8, p. 335)


Objection 2. « Un tel jugement ne peut être qu’une usurpation du droit de l’autorité ecclésiastique. »

Réponse : La sentence de l’autorité ecclésiastique résout tout cas douteux et oblige l’adhésion de tout catholique. Là où les faits n’admettent pas de doute, l’individu qui prévient le jugement de l’autorité ne lèse nullement celle-ci, tant qu’il distingue bien son avis privé d’avec la sentence officielle, en limitant la portée de celui-là au for de sa propre conscience. (Voir Felix Sarda y Salvany : Le Libéralisme est un Péché, chapitre 38)

Preuves que le particulier peut en certains cas constater l’hérésie avant le jugement de l’Église :

1) Denzinger 1105 : le Pape Alexandre VII a condamné le propos selon lequel on n’est pas obligé à dénoncer aux autorités celui qu’on constate être certainement hérétique si on n’en possède pas la preuve stricte. Cette condamnation implique directement que le particulier est parfois à même de savoir que quelqu’un est hérétique avant que les autorités ecclésiastiques s’en rendent compte, et même sans en avoir la preuve formelle.

2) St Alphonse de Liguori traite du devoir de dénoncer les hérétiques, même dans sa propre famille. Il affirme que ce devoir s’impose sans exception, mais seulement au cas où l’égaré serait réellement et formellement hérétique et pas seulement suspect ou se trompant de bonne foi. Cette distinction, présentée de manière claire et détaillée, serait parfaitement inutile si le particulier ne pouvait pas reconnaître un hérétique avant l’intervention des autorités. St Alphonse présume donc clairement que le particulier peut, du moins parfois, distinguer le soupçon de l’hérésie d’avec un cas certain, et reconnaître la présence ou l’absence de la pertinacité. (Theologia Moralis, lib. 5, n. 250)

3) Le Canon 1325 fournit la définition classique du mot « hérétique », puisée chez St Thomas : « une personne baptisée qui, tout en continuant de se vouloir chrétien, nie ou doute pertinacement d’une vérité qui doit être crue de foi divine et catholique. » Les canonistes s’accordent pour dire que la pertinacité en question consiste dans le fait de savoir que la doctrine niée est enseignée par l’Eglise comme révélée. Rien ici ne dépasse nécessairement la capacité de jugement du particulier.

4) Le Canon 2314 déclare que tout hérétique encourt une excommunication latae sententiae. Certaines peines doivent être infligées par suite d’un avertissement de la part de l’autorité, mais l’excommunication elle-même est automatique du moment que l’hérésie est exprimée. Les peines latae sententiae ne s’imposent pas là où personne ne peutt constater le délit avant la sentence – elles ne serviraient à rien.

5) Le Canon 188/4 déclare que si un clerc défaillit publiquement de la foi catholique, tous ses offices deviennent vacants par le fait même et sans besoin de déclaration officielle. Les canonistes s’accordent pour assurer que cette défaillance est vérifiée par l’hérésie publique selon la définition du Canon 1325 ; pas n’est besoin de se joindre à une secte. Or ce canon serait dépourvu de tout sens et de toute valeur si personne ne pouvait constater la présence de l’hérésie avant le jugement officiel. Comment un office peut-il devenir vacant automatiquement, par le fait même d’hérésie, et sans déclaration, si en effet un procès et une déclaration s’avèrent nécessaires ? A quoi bon nous avertir de cet effet de l’hérésie publique si nous ne pouvons en tenir aucun compte ?

6) Le sens du Canon 188/4 est clair en lui-même. « Clara verba non indigent interpretatione sed executione ******». Les canonistes sont unanimes à ce sujet. Toutefois ce canon n’a jamais été l’objet d’une interprétation officielle de la part du Saint-Siège. Par contre, il a un jumeau - le canon 646/1 n.2 concernant la vie religieuse, qui a été officiellement expliqué et qui jette bien de la lumière sur le Canon 188/4 également. Car en effet le Canon 646/1 n.2 déclare que tout religieux abandonnant publiquement la foi catholique devrait par le fait même être censé légitimement renvoyé. Le second paragraphe du même canon exige une déclaration du fait de la part du supérieur responsable. Les canonistes affirment que l’abandon public de la foi serait vérifié par tout cas d’hérésie publique. En vue du second paragraphe, on a consulté le Saint-Siège pour savoir si cette déclaration de la part du supérieur conditionnait le renvoi. La Commission Chargée de l’Interprétation du Code a répondu, le 30 juillet 1934, au négatif. Le Canoniste Jone explique que la déclaration du supérieur n’implique aucun procès et ne sert qu’à faire connaître des faits déjà subsistants : l’hérésie et le renvoi automatique qu’elle entraîne. Manifestement, donc, le supérieur et les autres religieux doivent être à même de constater le fait de l’hérésie pour pouvoir en tirer les conséquences dans l’ordre pratique.

7) De très nombreux théologiens ont discuté la possibilité d’un pape tombé dans l’hérésie soit avant soit après son élection. Cette hypothèse peut éclaircir aussi l’effet de l’hérésie publique de la part d’un coupable de rang inférieur en attendant le jugement de l’Eglise. Certains considèrent que dans l’hypothèse du pape hérétique il faudrait continuer de considérer le coupable comme pape - Cajetan, Suarez, Jean de St Thomas, Bouix, Journet. Mais le poids de l’autorité se trouve massivement du côté contraire - autorisant, pour un cas certain et publique, les fidèles à se retirer de l’autorité déjà perdue par le fait même de l’hérésie - St Robert Bellarmin, St Alphonse de Liguori, Ballerini, Naz, Billot, Sylvius, Melchior Cano, Wernz-Vidal, etc. Or cette doctrine ne vaudrait rien du tout et serait même absurde si les fidèles ne pouvaient pas reconnaître l’hérésie et en tirer les conséquences pratiques. Le traité de St Robert Bellarmin sur ce sujet dans son De Romano Pontifice est d’une valeur particulière. Il considère comme dépourvue de toute probabilité l’opinion contraire. Et parmi les cinq opinions qu’il recense sur le cas du pape hérétique, l’idée qu’il serait nécessairement impossible de reconnaître un tel cas en vue de la nature cachée de la pertinacité n’y figure même pas.

8) St Hypace, moine en Bithynie, a tenu à supprimer le nom de l’hérétique Nestorius dans les diptyques sacrés à partir du moment où celui-ci a commencé à prêcher son hérésie, divisant l’unité de personne en Notre Seigneur. Son ordinaire, Eulalius, tout en refusant l’hérésie du patriarche Nestorius, reprenait le saint moine de s’être retiré de la communion du patriarche avant le jugement d’un concile. Hypace lui répond : « …je ne puis insérer son nom dans le Canon de la Messe, parce qu’un hérésiarque n’est pas digne du titre de pasteur dans l’Eglise ; faites de moi ce que vous voudrez, je suis prêt à tout souffrir, et rien ne me fera changer de conduite. » (Petits Bollandistes, le 17 juin)

9) Le jugement de St Hypace semble confirmé non seulement par l’approbation de ses hagiographes, mais aussi par le décret du pape St Célestin selon lequel tout acte de Nestorius devrait être censé nul à partir du moment où il a commencé à prêcher l’hérésie… « car celui qui avait abandonné la foi par de pareils prônes ne peut ni destituer ni déposer qui que ce soit. » (St Robert Bellarmin : De Romano Pontifice, Cap. XXX) Les excès d’une certaine école sédévacantistes ayant au moins un représentant qui participe à ce forum le rendent à propos de remarquer que St Hypace ne s’est tout de même pas retiré de la communion d’Eulalius son ordinaire !

10) Il est plusieurs fois arrivé qu’un saint soupçonne d’hérésie un pape régnant, au point de menacer de se retirer de son obédience au cas où le pape ne s’amenderait pas. St Bruno, St Hugues de Grenoble et St Godefroy d’Amiens ont tous pris cette attitude vis-à-vis du pape Pascal II ; si St Yves de Chartres s’est opposé à eux, c’est qu’il considérait leur comportement incorrect « …à moins que…la personne placée sur le siège de Pierre…ne s’écarte manifestement de la vérité évangélique. » (Patrologia Latina, tom. 162, col. 240) Autrement dit, St Yves aussi soutenait la position exposée ci-dessus, mais ne pensait pas que l’hypothèse qu’elle envisage fût réalisée en son temps.

11) La Sainte Ecriture nous met souvent en garde contre les hérétiques. Il ne semble pas possible d’entendre tous ces textes comme se référant uniquement aux personnes condamnées comme tels par l’Eglise ou appartenant notoirement aux sectes condamnées.

i) Le plus frappant est le texte de la Lettre de St Paul aux Galates : « Mais si nous-mêmes ou an ange du ciel vous évangélisait autrement que nous vous avons évangélisés, qu’il soit anathème*******. Comme nous l’avons déjà dit, ainsi je le répète : si quelqu’un vous annonce un autre Evangile que celui que vous avez reçu, qu’il soit anathème. » (1 :8,9) St Paul ne se contente pas d’avertir ses convertis de refuser la nouvelle doctrine ; il leur impose de porter un jugement, et des plus sévères, du coupable : l’anathème, avec tout ce que cela importe. Puisque l’anathème ne convient pas au cas d’un catholique se trompant de bonne foi, il est évident que St Paul croit les Galates capables de distinguer l’erreur commise de bonne foi d’avec l’hérésie pertinace.

ii) A Tite (3 :10) St Paul commande : « Evite un homme hérétique, après une première et une seconde admonition ; sachant qu’un tel homme est perverti et qu’il pèche, puisqu’il est condamné par son propre jugement. » Cornelius a Lapide et Bellarmin entendent que ces avertissements sont nécessaires quand il est douteux si la personne est vraiment pertinace ou non. Au cas d’hérésie criante, aucun avertissement ne serait nécessaire. Notre Code de Droit Canonique retient cette distinction.


iii) « Gardez-vous des faux prophètes qui viennent à vous sous des vêtements de brebis, tandis qu’au-dedans ce sont des loups ravissants. » (Matthieu 7 :15) Tel est l’avertissement solennel de Notre Seigneur au sujet des hérétiques cachés. Certains apologistes de Karol Wojtyla semblent lire plutôt qu’il faut surtout se méfier de la possibilité de rejeter indiscrètement une brebis malencontreusement vêtue en loup. Mais la parole de Jésus-Christ est tout le contraire. Il nous dit de nous méfier même des hérétiques voilés (interprétation de Cornelius a Lapide, ad locum), ce qui ne serait pas possible si nous ne pouvions pas pénétrer au-delà de leur déguisement et reconnaître leur rejet obstiné de la foi de l’Eglise même malgré leurs protestations trompeuses d’orthodoxie.

12) Le cardinal de Lugo, considéré par St Alphonse comme le plus grand théologien depuis St Thomas, a consacré au sujet de la pertinacité nécessaire pour que quelqu’un soit hérétique l’étude le plus détaillé que nous connaissions. Rien ne peut en remplacer la lecture. Il discute la question de savoir si un avertissement est nécessaire avant de constater que quelqu’un est hérétique. Après discussion des avis de tous les théologiens et canonistes il affirme que l’avertissement n’est pas toujours nécessaire ni toujours exigé au niveau pratique par le Saint Office. La raison en est que l’avertissement ne sert qu’à établir que l’individu reconnaît l’opposition qui existe entre son opinion et l’enseignement de l’Eglise. Mais si cela était déjà évident, l’avertissement serait superflu. (Disputationes Scholasticae et Morales, Disp. XX, De Virtute Fidei Divinae, Sectio vi, n. 174 et seq.)

13) La Bulle Cum Ex Apostolatus du Pape Paul IV (le 15 février 1559 : Bullarium Romanum vol. iv. sect. i, pp. 354-357) prévoit qu’au cas où les cardinaux éliraient comme pape quelqu’un préalablement hérétique, l’élection serait tout simplement nulle et les fidèles auraient l’entier droit de se retirer de l’obéissance de l’élu qui ne serait pas leur chef. Les historiens nous apprennent que cette bulle visait, dans l’intention de Paul IV, spécialement la possibilité que soit élu après sa mort, le Cardinal Morone, soupçonné d’hérésie mais jamais condamné par l’Eglise. Ainsi le pape admettait que les fidèles pouvaient constater la présence de l’hérésie, et se retirer de l’obéissance du « pape » infecté par elle, sans attendre un jugement officiel.

* Si le Canon 1325 déclare hérétique celui qui nie ou doute pertinaciter d’une vérité à croire de foi divine et catholique, le Canon 1323 souligne qu’aucune doctrine n’est censée appartenir à cette catégorie « nisi id manifeste constiterit » (à moins que le fait ne soit manifeste). Herrmann résume la doctrine commune des théologiens en précisant qu’un propos hérétique est celui qui s’oppose directement, certainement et manifestement à une de ces vérités (Inst. Theol. Dogm. I. 32)
**St Alphonse de Liguori: « Personne n’est hérétique tant qu’il est disposé de soumettre son jugement à l’Eglise, ou ignore que la vraie Eglise du Christ tient le contraire, même s’il défend mordicus son avis en conséquence d’une ignorance coupable voire crasse. » (Theol. Moral. lib. 3, n. 19) Pour savoir comment reconnaître cette « pertinacité », voir de Lugo : (Disputationes Scholasticae et Morales, Disp. XX, De Virtute Fidei Divinae, Sectio vi) et A. V. Xavier da Siveira: Actes, Gestes, Attitudes et Omissions Peuvent Caractériser un Hérétique, apud Catolicismo, n. 204, décembre 1967.
***Voir Félix Sarda y Salvany : Le Libéralisme est un Péché, chapitre 38 pour la distinction entre le jugement du particulier et celui de l’autorité en matière doctrinale. Remarquer aussi, par exemple, que dans sa bulle Cum Ex Apostolatus déclarant nulle toute élection d’un hérétique à la papauté, Paul IV invite ceux qui se rendraient compte de cette nullité à retirer leur obéissance à l’élu, mais ne censure nullement ceux qui resteraient dans sa communion. Consulter aussi St Thomas d’Aquin, Summa Theologiae, II-II, 60,6 : «…de même qu’il serait injuste si un homme contraignait un autre à observer une loi qui n’était pas approuvé par l’autorité publique, aussi est-il injuste si un homme contraint un autre à se soumettre à un jugement qui est prononcé par quelqu’un autre que l’autorité publique. »
****Si, en évaluant les faits, nous devons vouloir surtout conformer notre jugement à la vérité objective, St Thomas nous rappelle qu’en jugeant les hommes, « nous devons plutôt nous efforcer de les juger bons, à moins qu’il ne se présente des preuves manifestes du contraire. » (Summa Theologiae : II-II, Q.60, A.4 responsio ad secundum)
St Augustin applique la loi de la charité plus explicitement au cas de manquements dans l’ordre doctrinal par les paroles suivantes : « Et pourtant, si, dans l’Eglise, de différents hommes tenaient toujours de différentes opinions sur un point, sans violer la paix, alors, jusqu’à ce qu’un seul, simple et clair décret soit passé par un concile universel, il aurait convenu que la charité qui cherche l’unité jette un voile par-dessus l’erreur de l’infirmité humaine, comme il est écrit, ‘car la charité couvre la multitude des péchés.’ Car, puisque son absence [c’est-à-dire l’absence de la charité] rend inutile la présence de toute autre chose, nous pouvons bien supposer que dans sa présence se trouve le pardon de certaines choses qui manquent. » (Du Baptême Contre les Donatistes, livre. 1)
***** « L’intention de ne pas se soumettre à l’autorité ecclésiastique est nécessaire et suffisante pour constituer la pertinacité contre la foi. » (Suarez : Opera, XII, p.474, éd. Vivès) Nombre d’autres auteurs peuvent être cités pour confirmer le simple fait que, là où un baptisé nie sciemment une doctrine de foi divine et catholique, il est censé hérétique au for externe. Au for interne, bien sûr, il pourrait ne pas être coupable du péché d’hérésie. Peut-être agit-il en conséquence d’un délire pathologique, d’effroi ou de l’influence d’un narcotique. Peut-être tout simplement n’a-t-il jamais appris le devoir de soumission au magistère. Dans ces hypothèses l’égaré n’est pas coupable du péché d’hérésie. Mais aux yeux de l’Eglise il n’est pas de ses fidèles. Au for externe il est censé hérétique. (Voir Cal. Billot: De Ecclesia, 4ième éd., p. 289-90, et le chanoine E. J. Mahoney, dans les pages du Clergy Review 1952, vol. XXXVII, p.459 ou le sujet a été analysé en détail.)
******Cf. St Thomas Aquinas: Summa Theologiae, II-II, Q. 120, a. 1, resp. ad tertium.
*******Et cette hypothèse paradoxale d’un ange du ciel qui prêcherait un autre évangile - ne serait-ce pas une image du paradoxe de nos jours : le « pape » hérétique ?

John DALY
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La discussion

images/icones/neutre.gif Peut-on juger l'hérésie ? Réponse à l'abbé Ro [...] par John DALY (2005-05-04 12:57:17)
     images/icones/neutre.gif aucun théologien catholique par Kamate (2005-05-04 14:47:20)
     images/icones/fleche2.gif La solution : porter plainte par Troubadour (2005-05-04 18:21:18)
         images/icones/1w.gif Mais c'est ce qu'a fait l'abbé ... par PGM (2005-05-13 07:49:38)
             images/icones/fleche2.gif Bien sûr ! Elargissons le Front ! par Troubadour (2005-05-13 09:15:26)